Voyageuse déconnectée ou très connectée, souvent par monts et par vaux, en stop ou à vélo, Florence a un côté insaisissable. Florian a pourtant réussi à capter la parole de notre explor’actrice au cours d’un interview riche et inspirante…
Es-tu Lyonnaise ? Non, Provence !
Plat préféré ? Lasagnes.
Quartier que tu fréquentes le plus ? Centre de Nantes.
Ton bar ? Le Sur-Mesure.
Pastis, bourbon, bière ou Perrier ? Perrier.
Solitaire ou en groupe ? Solitaire.
Couleur préférée ? Violet.
Est-ce que tu chantes sous la douche ? Ça m’arrive.
Te lèves-tu du pied gauche ou du pied droit ? Pied gauche… je suis gauchère.
Thé ou café ? Thé.
Matin ou soir ? Soir.
Mot préféré ? Abracadabrantesque !
Chanson préférée ? Stay de Rihanna.
Quel est ton métier actuellement ? Travailles-tu pour financer tes voyages ?
Non, le voyage En fait, c’est un peu l’essence de ma vie. « Essence », donc pas le pétrole du coup, mais c’est quand même le gasoil qui me permet d’avancer. Chaque jour je mène un train de vie assez imprévisible. Je ne me dis pas : « je mets de côté, je travaille ça pour faire ça après. Non, je suis bien, je suis contente de faire ce que je fais. Et à un moment j’aurai de l’argent de côté pour partir effectivement vers un autre projet.
Quelles sont tes passions ?
J’en ai un milliard ! Je suis quelqu’un de très active pour ne pas dire hyperactive. J’adore faire du tennis, de la danse hip-hop, de la natation, de la course à pied, de la peinture, de l’écriture, des montages vidéos, enfin voilà, plein plein plein de choses… de la lecture aussi, etc.
Le voyage qui a changé ta vie ?
Le voyage à vélo. Je suis partie, je ne connaissais rien, je ne savais pas qui j’étais. Et ça peut paraître hyper cliché, mais c’est vraiment ce qui m’est arrivé, quoi. Je me suis découverte dans ce voyage, j’ai pris confiance en moi comme jamais, et ça m’a vraiment changée ensuite dans tout ce que j’ai pu faire. Donc maintenant, je sais que le vélo c’est un peu le leitmotiv de ma vie. J’aurai toujours des projets liés à ça quoi qu’il en soit.
Le voyage ou l’aventure ?
L’aventure !
UN livre… ?
Bah ouais, sans m’en rendre compte, c’est ce bouquin que j’ai lu d’un mec qui voyageait à vélo. C’est ça qui m’a fait partir, et c’est ça qui m’a fait changer ma vie finalement.
La référence ?
The man who cycled the Americas de Mark Beaumont. C’est un Écossais.
Si tu devais partir sur une île déserte… que prendrais-tu dans ton sac ?
Alors… je prendrais clairement, même si ça peut ne pas paraître essentiel, un bouquin. J’ai vraiment cette phobie d’être quelque part, de m’ennuyer, et de ne rien avoir à lire. Donc un bouquin ! Je prendrai un réchaud pour pouvoir cuisiner, avec ce qu’il faut de nourriture pour tenir quelques jours. Peut-être une tente, parce que le problème des îles désertes, c’est que t’as quand même des scarabées, des scorpions et des trucs comme ça, donc ouais une… non, un hamac, sur une île déserte je prendrai un petit hamac et un sac de couchage ! Puis un récipient dans lequel mettre de l’eau.
Tu choisis d’emporter quel livre du coup ?
Un livre d’Alexandra Lavigne. C’est mon héroïne, elle me fascine.
Quel est ton moment préféré dans un voyage ?
C’est quand je pédale et qu’il y a le coucher du soleil
La nature que tu avalais sur les routes du monde était-elle inspirante ?
Ah oui. Toujours !
Jamais déçue ?
Si forcément. C’est justement ce que racontait déjà Alexandra Lavigne dans ses bouquins au début du XXe siècle : la nature devient un peu une vaste usine malheureusement. Donc oui, il y a plein d’endroits où tu te retrouves dans des zones polluées, tu vois des déchets, où tout simplement tu roules au bord des routes. Donc oui, bien sûr.
Et tu ne pouvais pas éviter ces endroits ?
Bah, en fait non, ça arrivait sur ma route. Moi, je me disais que je voulais aller là et ça se trouvait effectivement sur mon chemin. Tu vois tout de la société, et souvent de choses dont tu n’es même pas conscient. Notamment quantité de déchets, ça, c’est sûr et certain. Mais la nature reste belle en tout cas. Il y a encore plein d’endroits qu’on sauvegarde, donc je reste optimiste !
Tu disais lors de ta conférence qu’il peut t’arriver d’écrire ?
Oui, c’est ça !
Tu emportes avec toi des carnets de voyage ?
J’ai des petits carnets dans lesquels j’écris, oui. Le premier livre que j’ai sorti, c’était un récit de voyage. Alors je ne pensais pas forcément écrire un bouquin quand je suis partie, mais je prenais des notes ; tous les soirs. J’aime bien écrire sur mes rencontres, les gens qui me marquent, ce qu’ils m’ont dit, où quelque chose qui m’a interpellée. Donc, j’ai cette motivation d’avoir un côté un peu reporter dans mes voyages. Et après, il y a la deuxième phase aussi qui concerne plus l’écriture de textes inspirés.
Comment se manifestent ces inspirations ? Peuvent-elles surgir à n’importe quel moment ?
Je ne sais pas… des fois, j’ai des vers qui me viennent et c’est tout ! C’est un truc de ouf. Sans jouer à Victor Hugo, mais des fois j’ai des phrases qui sortent d’un coup : “C’est un voyage avec peu de bagages, mon stylo et mes jambes sont ma liberté. » Voilà des poèmes comme ça qui deviennent un leitmotiv, je me les répète et je joue avec. J’ai écrit un texte aussi dans lequel je raconte que : « Je suis une troubadour moderne sans cornemuse ni château, mais j’avance à vélo, guidée par Jules Vernes. » ces mots surgissent de je ne sais où. Parfois je fais des chansons avec. Donc voilà, je ne sais vraiment pas quand ça va arriver. On ne sait jamais quand ça vient l’inspiration !
Peut-être que le fait de rouler déclenche le pédalier des jolis mots. D’ailleurs, qu’est-ce qui t’a donné l’envie d’écrire ?
C’est le voyage clairement.
Et est-ce que tu partages tout ça ? Où peut-on se le procurer ?
J’ai publié deux bouquins. Le premier, c’est : « L’Europe à coup de pédales », on peut le trouver en ligne. Et le deuxième, c’est : « Les pérégrinations d’une nomade », et on peut le trouver aussi en ligne ; c’est un recueil de poésies.
Éditeur ?
Non, autoédition.
L’écologie fait-elle partie de tes préoccupations ?
Totalement !
Tes voyages ont-ils participé à éveiller ta conscience sur ce sujet ?
Oui. Et puis mes parents étaient écolos. J’ai grandi avec l’idée qu’on pouvait trouver d’autres organisations du monde.
Comment cela se traduit dans la vie de tous les jours ?
Pour moi, la base de l’écologie, c’est d’abord de moins consommer. Je suis plutôt dans une dynamique de sobriété. Donc, j’essaye de ne pas m’attacher aux choses, d’en avoir le moins possible. Je suis assez minimaliste. Donc pour moi ce qui est fondamental, c’est de conserver une certaine forme de sobriété.
Tu as l’air d’être assez pédagogue envers tous ceux qui désirent partir. Quel est le conseil le plus précieux que tu pourrais leur donner ?
Écoutez-vous, surtout si vous ne vous sentez pas bien dans vos vies. Écoutez-vous vraiment ! N’intériorisez pas les peurs que les autres projettent sur vous.
Des voyages en perspective ?
Oui, deux ! Donc là, un petit voyage à pied de cinq jours. Je vais faire le GR en Bretagne. Et puis cet été je compte traverser à la boussole, le Royaume-Uni.
L’eau… c’est un élément qui te parle ?
Ça fait déjà un an que je rencontre de plus en plus de gens qui ont des projets liés à la mer, à la voile et tout ça… et que ça me parle. J’ai appris aujourd’hui qu’on peut mettre son vélo sur un voilier. Donc peut-être qu’un jour je pourrai traverser l’Atlantique pour ensuite pédaler en Amérique latine.
Es-tu déjà monté à bord d’un voilier ?
Non, jamais.
La question que tu aurais voulu que je te pose : es-tu épanouie ?
En vrai, là ça va. Je sens que je pourrai l’être encore plus, mais ça va.
Le voyage t’aide à cela ?
Ouais carrément. C’est pour cela que je voyage aussi. C’est une forme d’épanouissement… C’est vraiment la possibilité de vivre plus intuitivement ! Alors que dans nos sociétés je trouve que tout est hyper cadré et tellement rationalisé. Moi, j’aime me dire : « je vis à l’intuition, je vis en suivant mon cycle biologique. » Et rien que ça, de se réveiller quand tu te réveilles, de dormir quand tu es fatigué. De respecter ses cycles naturels, c’est épanouissant parce que tu t’écoutes.
Patrice Franceschi me disait : »il y a de nombreux voyages sans aventure et nombreuses sont les aventures sans voyage. Pour toi, partir, c’est le voyage ou l’aventure ?
L’aventure !
Et c’est quoi pour toi l’aventure ?
C’est l’inconnu, l’imprévu. Alors que le voyage pour moi… je ne sais pas, il y a un côté plus organisé, avec l’idée que tu vas revenir. Tandis que l’aventure, ça peut être toute la vie. Le voyage, il y a toujours cette idée que ça va être temporaire.
Il me semble que l’aventure est une disposition du cœur qui peut s’expérimenter sans partir. Juste là, chez soi, chaque jour. L’aventure sous-entend pour moi que notre esprit veille, que l’on garde les yeux ouverts, et que l’on protège son âme de la poussière que déposent les jours qui passent et la lassitude qu’ils pourraient générer.
Oui ! L’aventure, c’est tous les jours. Ça peut être une rencontre dans un bar, démarrer une nouvelle activité…
Crois-tu que le voyage, ou l’aventure donc, a changé ta façon de vivre le quotidien ?
Oui, je vois que je sens beaucoup plus les gens qu’avant. Ça m’a permis de développer une forme d’intuition avec les autres. Je sens très vite les gens, leur énergie, donc ça, c’est un truc très fort que j’ai réalisé récemment. Et après dans ma façon d’être : je vois bien que je ne réfléchis pas comme la plupart des gens. Je suis devenue très spontanée alors qu’avant j’avais plus ce besoin de prévoir les choses.
Propos recueillis par Florian Chalvet, bénévole, lors du Festival du Voyage Engagé 2022